Semences d’oignon et autosuffisance

septembre 29, 2019
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La marche de Safo à Bamako, la capitale du Mali, prend environ quatre heures. Sitan Diarra, une petite femme d’à peine 5 pieds de haut, avait l’habitude de faire cette marche tous les jours.

La marche de Safo à Bamako, la capitale du Mali, prend environ quatre heures. Sitan Diarra, une petite femme d’à peine 5 pieds de haut, avait l’habitude de faire cette marche tous les jours. Elle transportait des produits agricoles sur sa tête pour les vendre au marché. À la fin de la journée, elle rentrait chez elle à pied à Safo.

Sitan souhaitait un emploi qui lui permettrait d’avoir un meilleur revenu et d’éviter de faire le périple exténuant et dangereux à Bamako à chaque jour. Elle avait de l’expérience en agriculture, comme beaucoup de ses voisins et voisines. Mais au Mali, les hommes possèdent la plupart des parcelles de terre – 86% contre 14% pour les femmes. Leurs parcelles ont également tendance à être trois fois plus grandes que celles des femmes. Un ensemble complexe de normes structurelles et culturelles liées au genre contribue à cette situation.

Le résultat crée des obstacles importants pour les agricultrices. Avec moins de terres, les femmes comme Sitan ont moins d’espace pour cultiver la quantité de plants nécessaire pour bien gagner leur vie. Elles ont également moins accès au crédit qui leur permettrait d’investir dans leur exploitation agricole ou de démarrer une entreprise, parce que la terre est habituellement requise comme garantie de prêt.

Ce cercle vicieux est aggravé par le fait que les agricultrices reçoivent moins de soutien que leurs pairs masculins, que ce soit de sources nationales ou internationales. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, seulement 10 % de l’aide totale à l’agriculture, à la sylviculture et à la pêche va aux femmes.

Sans soutien, il peut être difficile pour des femmes comme Sitan d’acquérir les connaissances techniques nécessaires pour bien vivre de l’agriculture. Elles peuvent se retrouver coincées dans des emplois précaires, comme la vente de biens au marché pour très peu d’argent, simplement parce que la plupart de la formation et du soutien au développement des compétences sont destinés aux hommes.

Notre partenaire Cab Demeso va à l’encontre de cette tendance en offrant une formation sur les pratiques agricoles agroécologiques aux agricultrices autant qu’aux agriculteurs, avec l’appui d’USC Canada.

Sitan, anxieuse de ses revenus et épuisée par ses responsabilités à la maison et ses longues marches quotidiennes, a décidé de s’inscrire aux ateliers de production de semences de légumes biologiques offertes par Cab Demeso dans le cadre de notre programme Semences de la survie.

Légèrement intimidée, elle s’est vite rendue compte que les connaissances qu’elle avait reçues de sa mère et de ses grands-mères sur les pratiques agricoles traditionnelles lui donnaient un avantage dans l’apprentissage de nouvelles techniques agroécologiques pour une agriculture durable. Elle a pu approfondir une compétence convoitée : la production de semences. Avec sa formation, elle a appris à contrôler rigoureusement la qualité des semences lors de la culture et du stockage des semences, y compris les semences d’oignons.

Sitan a maintenant son propre lopin de terre où elle cultive de l’amarante, des eucalyptus et des orangers, ainsi que des semences d’oignons et de plantes forestières. Sur un espace limité, la culture de semences nécessite prend moins de place et procure un revenu plus élevé que la culture de légumes ou de grains à manger. La formation de Cab Demeso l’a aidée à devenir si habile dans la production de semences qu’elle a décidé de faire partie d’un groupe de 10 diplômés du programme qui ont déposé une demande de certification officielle comme producteurs de la graine d’oignon Violet de Galmi. Cette variété populaire est bien appréciée pour son goût, sa nutrition et son aptitude au stockage. Sept de ces diplômés ont réussi, dont Sitan.

Aujourd’hui, Sitan peut vendre les graines d’oignon Violet de Galmi à un prix plus élevé, car sa certification augmente la confiance de ses clients dans son produit. Elle est fière d’accroître la sécurité semencière des agriculteurs autour d’elle en augmentant la disponibilité de semences biologiques de qualité. Et elle aime savoir que ses oranges et son amarante fournissent un apport nutritif à l’alimentation des gens qui l’entourent.

Grâce à tout cela, Sitan a pu cesser son voyage quotidien à Bamako. « J’ai arrêté parce que je gagne beaucoup plus avec ma production de semences », dit-elle. Elle gagne un revenu suffisant pour subvenir à ses besoins. Et elle se sent plus en confiance et plus en sécurité parce qu’elle peut maintenant subvenir à ses propres besoins, comme agricultrice.

« Je ne peux pas passer une journée sans voir mon jardin. »